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Bonne
Nouv.elle
!
— La parole inclusive du dimanche,
Du premier dimanche de l’Avent au dimanche de Pâques, un.e invité.e nous donne à entendre l’homélie dominicale.
S3 Episode 16
02/03/2022 – Mercredi des Cendres
Lecture de l’évangile : Marina
Textes du jour
Jl 2, 12-18
Ps 50
2 Co 5, 20 – 6, 2
Mt 6, 1-6.16-18
(Lire les textes sur aelf.org)
Le texte de l’homélie
L’hypocrite veut se montrer ! Que cache-t-il ?
L’hypocrite veut être glorifié ! Que cache-t-il ?
L’hypocrite veut paraitre juste ! Que cache-t-il ?
A l’inverse de cette attitude, qui est proche de l’intrusion, il est question dans ce passage de secret et d’une forme de transparence vécue dans le secret. Mais qu’est-ce que la transparence… envers qui, envers quoi est-il juste d’être transparent ? Le psaume 51 (50), qui accompagne l’évangile du jour, est attribué au roi David à un moment particulier de son histoire : après s’être approprié la belle Bethsabée, et ayant pour cela tué son mari, Urie le Hittite (2 Samuel 11), le prophète Nathan vient de la part de Dieu le confronter et le mettre face à ses actes. David exprime alors cette prière : « Contre Toi et Toi seul j’ai péché ». Ces versets m’ont toujours questionnée. Est-ce de l’hypocrisie ? Est-ce un manque de transparence dans la prière ? David est-il en train de cacher la réalité de son crime ? Nulle part dans ce psaume il n’est question d’autres personnes. N’a-t-il pas d’abord péché contre Urie et Bethsabée ? N’a-t-il pas détruit une vie et ce qui faisait leur union ? Quel choix a eu Bethsabée après que le roi ait mis la main sur elle ? Est-ce de l’emprise ?
Cette posture de David fait échos aujourd’hui avec l’agression sous toutes ses formes, que vivent les victimes d’abus et de pédo-criminalité de l’institution ecclésiale. Celles qui ont témoigné dans le rapport de la CIASE et qui ont parfois derrière elles des dizaines d’années de silence avant d’oser parler. Pour la plupart, elles ont souvent d’abord tenté de frapper aux portes des évêchés, des communautés, pour se faire entendre. Combien nombreuses sont-elles à avoir entendu en retour un : ‘Pardonne-nous, Seigneur’ ! Où est le début et la fin de l’intrusion qu’elles ont subie ? Entre un formatage très jeune, qui empêche d’écouter ce qu’il y a à l’intérieur de soi, un système qui permet l’agression et qui se défausse ensuite de ses responsabilités, et ce faisant, empêche la reconstruction de la personne, cette intrusion, ce ‘manque de respect à l’infini’ ne dit-elle pas la pathologie d’une institution qui persiste dans le déni et l’arrogance !
Qu’est-ce que le secret qui préserve la vie, et celui qui donne la mort ? Un enfant abusé qui ne peut être entendu, à qui on dit de se taire pour protéger son agresseur – et la bienséance au passage – au prix de la restauration de sa vie et de sa santé, est enfermé dans un secret qui donne la mort, un secret mortel. Une confession qui enferme avec le confesseur est un secret mortel. Un stage de réassignation de genre, dans la suite des soi-disant thérapies de conversion, qui force les confidences, tord et interprète les paroles qui se cherchent et prétend remettre des individus dans le ‘droit chemin’ de leur genre et de leur sexualité, transmet-il le moindre respect pour ce que ces personnes confient dans leur fragilité ? Comment ne pas y voir une intrusion majeure dans la construction de leur personne !
Selon moi, le respect et le juste secret, c’est de laisser un individu unique, un individu au chemin absolument singulier, se découvrir unique et précieux aux yeux de son créateur. C’est laisser à la personne tout l’espace, l’intimité et la pudeur pour qu’elle apprenne à se connaitre, à explorer ce qu’elle est et ressent, hors de tout jugement, impudeur, indiscrétion malsaine et hors de toute théorie plaquée et désincarnée qui ne cherche qu’à remettre dans une norme. Le respect, c’est laisser l’autre être autre. Le secret juste dans lequel un individu peut se tenir devant Dieu sans crainte et sans intermédiaire pour prendre la place de Dieu, c’est cette juste distance où l’on ne s’érige pas en expert et où l’on favorise la croissance de l’enfant, de l’adolescent, de la sœur ou du frère, hors de toute culpabilisation maladive. Le juste secret, c’est aussi celui qu’on choisit ou pas d’exprimer, et ce faisant, qui n’enferme pas mais qui est créateur d’un espace psychique sécure. Il a sa place dans un ‘safe space’, auprès d’un tiers qui aère une relation problématique, dans le silence qui soutient la parole et ne la rejette pas. Là, il est possible d’entendre dans sa chambre la plus retirée : ‘Tu es mon unique, en toi j’ai mis toute ma confiance’. En effet, qui peut vraiment voir en soi, sinon Dieu ? Qui peut permettre le miracle d’être accueilli par un regard vraiment transparent, sinon l’Esprit de Dieu sur lequel nul ne peut mettre la main ! La transparence et la confiance ne s’acquièrent pas, ne s’imposent pas, mais se reçoivent du Dieu-Liberté ; elles nous engendrent et nous enseignent ce respect infini de la conscience humaine. ↓
Brigitte Chazel
