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Bonne

Nouv.elle

!

— La parole inclusive du dimanche,
Du premier dimanche de l’Avent au dimanche de Pâques, un.e invité.e nous donne à entendre l’homélie dominicale.

S2 Episode 18

14/03/21
4ème dimanche du Carême

Lecture de l’évangile : Marina

Homélie : Agnès Gros

Et sur Anchor.fm, Spotify ou d’autres plateformes de podcasts.

Textes du jour

2 Ch 36, 14-23
Ps 136, 1-6
Ep 2, 4-10
Jn 3, 14-21
(Lire les textes sur aelf.org)

Le texte de l’homélie

L’Évangile d’aujourd’hui se place aussitôt après l’épisode bien connu de Nicodème qui vient voir Jésus de nuit. Jésus lui parle du serpent de bronze élevé par Moïse dans le désert. De quoi s’agit-il exactement ? Le peuple hébreu a à maintes reprises récriminé contre Moïse et contre le Seigneur : pourquoi les avoir fait sortir d’Egypte où ils mangeaient à leur faim si c’est pour les laisser mourir de soif et de faim dans le désert ? Cette fois, Dieu les punit en leur envoyant des serpents venimeux qui les mordent et les font mourir. Le peuple reconnaît alors sa faute et demande qu’on éloigne d’eux ces serpents. Le Seigneur se laisse toucher et demande à Moïse de façonner un serpent de bronze et de l’accrocher sur une perche. Quiconque aura été mordu et lèvera les yeux vers le serpent vivra. Un instrument de mort devient ainsi instrument de salut ; un symbole de mort devient symbole de vie.
Jésus compare ce serpent salvateur en haut de sa perche à lui-même, le Fils du genre humain qui sera élevé. On pense bien sûr tout de suite à Jésus hissé sur la Croix. Mais ici la Croix, comme partout dans l’Evangile de Jean, n’est pas un instrument de mort. C’est un signe de victoire, de victoire sur la mort. Ce qui compte ici n’est pas la souffrance (on parle trop souvent de Jésus qui nous sauve par ses souffrances), mais plutôt le fait qu’en acceptant de mourir sur la Croix, Jésus va vaincre la mort et par cela même nous emmener tous avec lui, nous élever tous vers lui. Ce symbole de mort qu’est la croix devient alors symbole de vie.
Le Fils du genre humain doit être élevé pour qu’en lui toute personne qui croit ait la vie éternelle. Que veut dire « croire », ce verbe omniprésent dans l’Évangile de Jean ? Est-ce qu’on choisit de croire ou est-ce quelque chose qui vous tombe dessus ? Réfléchir à ce que veut dire « croire » évoque pour moi une très belle injonction que l’on trouve aussi dans l’histoire de Moïse : « Je te propose aujourd’hui de choisir ou bien la vie et le bonheur, ou bien la mort et le malheur. Écoute les commandements que je te donne aujourd’hui : aimer le Seigneur ton Dieu, marcher dans ses chemins, garder ses ordres, ses commandements et ses décrets. Alors, tu vivras et te multiplieras ». Pour moi, croire, c’est choisir la vie, c’est envers et contre tout savoir que Dieu m’aime, telle que je suis, avec tous mes défauts, mes erreurs, mes doutes. C’est dans la prière, au fil des jours et des années, que cela est devenu pour moi une certitude. C’est aussi ce qui à un moment donné m’a poussée à faire un travail psychologique pour apprendre à m’aimer davantage, puisque justement j’étais digne d’être aimée. Aujourd’hui, chaque matin, j’espère rechoisir la vie.
Jésus parle ensuite à Nicodème du jugement de ceux qui ne croient pas en Lui. J’ai du mal à accepter que ceux qui n’ont pas reçu ce beau cadeau de la foi n’aient pas droit à la vie éternelle. Je connais des personnes qui, sans être chrétiennes, sont de vraies sources d’inspiration, de par leur bienveillance et leur dévouement. J’ai aussi des amis très proches, dont la recherche spirituelle leur a fait faire des détours par l’hindouisme, le bouddhisme, la méditation de pleine conscience et qui ont une vraie vie intérieure, bien plus que certains pratiquants du dimanche qui n’ont pas de vie de prière personnelle. Mais qui suis-je pour juger ? Seul Dieu connaît le fond des cœurs.
Jésus parle de croire en Lui, Lui qui est la Lumière du monde. Les humains préfèrent les ténèbres car la lumière trop forte révèle leurs manquements. Oui, la lumière peut faire peur. D’ailleurs, Nicodème est venu voir Jésus de nuit, pour que les autres notables juifs ne le voient pas parler à cet homme qui fait des choses scandaleuses. Moi aussi, quand je m’arrête à mes faiblesses, quand je doute de moi, je ne me laisse pas sauver, et je reste dans les ténèbres.
Mais si je fais le bien, si je m’abandonne à Dieu, avec tout ce que je suis, mes fautes, ma petitesse, si je lève les yeux vers la Croix, je laisse le Christ agir en moi. Je me laisse être ses mains, sa bouche, son instrument. Je deviens complètement ce pour quoi j’ai été créée (c’est cela être saint, disait ce grand spirituel qu’était Thomas Merton). Je deviens comme du verre transparent qui laisse passer la lumière de Dieu, je rends témoignage que Jésus est Sauveur, qu’il est venu pour nous tous ! Oui, je crois profondément que sa Croix embrasse tout l’univers, comme il est dit dans cette belle façon de faire le signe de la Croix :
Il y a le haut et le bas,
La gauche et la droite,
Il y a le ciel et la terre,
Un bout du monde et l’autre bout.
De haut en bas,
La Croix relie les hommes à Dieu.
De gauche à droite,
La Croix relie les hommes entre eux.
En faisant sur moi le signe de la Croix,
C’est tout entier, Seigneur,
Que je me présente à Toi.

Agnès Gros

Agnès a gardé de ses années à l’étranger, notamment à Singapour, une passion pour l’autre différent, pour la spiritualité avec ses multiples visages et pour l’Inde. Elle poursuit cette aventure à Marseille, à travers son étude du moine Thomas Merton et son dialogue avec les traditions asiatiques. Elle aime ses rencontres dans le domaine interreligieux et tout ce qui touche à l’accompagnement, aux liens entre spiritualité et psychologie. Elle est engagée dans la Communauté de Vie Chrétienne (CVX), sur les pas d’Ignace de Loyola.