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Bonne

Nouv.elle

!

— La parole inclusive du dimanche,
Du premier dimanche de l’Avent au dimanche de Pâques, un.e invité.e nous donne à entendre l’homélie dominicale.

S2 Episode 10

24/01/21
3e dimanche du temps ordinaire

Lecture de l’évangile : Marina

Homélie : Maxime

Et sur Anchor.fm, Spotify ou d’autres plateformes de podcasts.

Textes du jour

Jon 3, 1-5.10
Ps 24, 4-9
1 Co 7, 29-31
Mc 1, 14-20
(Lire les textes sur aelf.org)

Le texte de l’homélie

Je ne me sens pas dans une période d’appel, peut-être d’ailleurs comme un certain nombres d’entre vous. Ces derniers mois de pandémie m’ont fatigués, bousculés, désequilibrés ; en attaquant ma capacité à m’enthousiasmer et à me projeter dans le futur ; en réduisant ma vie sociale et l’horizon de mes possibles. M’obligeant alors à serrer les dents, à courber le dos en essayant de faire front.
Or, ce texte, j’y ai pris l’habitude d’y entendre des choses vitalisantes ! La force de l’appel de Jésus, avec :
– son caractère personnel
– la mise en mouvement qu’il engage
– le « oui » retentissant de confiance qu’il provoque chez les futurs disciples, qui quittent quotidien, confort et familles pour répondre à une promesse : « je vous ferai pêcheur d’humain ».
– Et enfin, et c’est peut-être ce qui est le plus difficile aujourd’hui avec ce texte, le mot « aussitôt » qui apparait deux fois, me donnant une fois de plus le sentiment que tout cela se fait avec audace, radicalité, espérance. Des choses qui.. m’animent peu ces derniers temps.
En méditant, je me rend compte que j’ai toujours perçu ce « oui » des disciples comme le dépassement d’éléments tangibles et positifs : ils quittent métier, maison, famille, etc…
J’ai reçu cela comme un appel à la spontanéïté : « Pour grandir, rencontrer l’autre, découvrir l’amour de Dieu, changer le monde : je quitte mon petit confort. » Voila une idée grisante pour l’idéaliste que je suis !
Mais dans des périodes comme celles traversées ces derniers temps, ça me questionne. Je n’ai jamais laissé au texte la possibilité de me parler de d’autres type de dépassement. Pourtant, répondre oui à la promesse faite par Jésus, CROIRE en la bonne nouvelle, c’est aussi quitter ses peurs, ses angoisses et les croyances fausses sur soi-même. C’est abattre les armures construites en grandissant.
Le « oui » des disciples n’apparait alors plus seulement comme un pari qui demande du culot, mais aussi comme un chemin de libération.
Ce chemin, pour moi, il s’incarne dans un travail de déconstruction. Depuis plusieurs années, je cherche à renouveller ma compréhension de ce que signifie « être autonome » et « être indépendant ». Trop longtemps, j’ai internalisé l’idée que je devais me débrouiller, ne pas gêner ou déranger, être dans une forme de retenue voir de stoïcisme… Comme une variation autour des idées de force, de puissance et de controle finalement. Or ceux qui me connaissent bien savent à quel point mes émotions et mes convictions sont parfois à fleur de peau. En essayant d’équilibrer ce grand écart, je me suis isolé et ligoté, et cela a limité ma capacité à m’aimer largement, à aimer largement, et me laisser aimer largement. Encore aujourd’hui, je lutte parfois pour ne pas retomber dans certains schémas destructeurs et garder en tête que c’est aussi par les failles apparentes -acceptées et partagées- que rentre la lumière.
Je fais souvent le lien entre ce travail personnel, la façon dont l’invitation de Dieu à la vulnérabilité me parle et mes études, durant lesquelles je me suis particulièrement penché sur le genre et la construction des masculinités. J’y ai en effet eu l’impression d’une révelation : le sentiment de pouvoir entendre l’humain nouvellement et interroger la supposée « naturalité » d’états de fait. J’ai compris que pendant des siècles le vécu des hommes « petit h » était considéré neutre, homogène et universel, ne laissant aucune place pour l’expression ni de vécus féminins, ni -en miroir- de vécus masculins dans leurs pluralités. Prendre les lunettes du genre, pour moi, c’est donc me mettre à l’écoute. C’est chercher à comprendre comment des expériences similaires s’expriment différement, singulièrement. C’est participer à redonner à chaque personne une juste place, une juste importance, une juste valeur.
Aujourd’hui en faisant l’effort de redécouvrir ce texte, je lui permets une résonnance nouvelle dans ma vie. La période collectivement difficile que nous traversons depuis des mois ne m’éloigne pas de la possibilité de répondre, moi aussi, comme un disciple, à un appel. Mais elle m’oblige à me laisser rejoindre autrement, en acceptant les freins actuels plutot qu’en me buttant contre eux, en engagant et en partageant des moments de vulnérabilité avec mes proches, en laissant ma tête et ses besoins de contrôle faire de la place aux affects de mon corps et mon coeur.
Rêver et construire un monde plus libre, plus juste, plus respectueux – un monde plus féministe et plus inclusif- ne pourra que faciliter cela, chez moi et -je le crois- chez beaucoup d’autres. Vous le dire et vous y inviter avec Bonne Nouv.elle, quel honneur et quel joie !
Maxime
Idéaliste, curieux et passionné, Maxime cherche à être à l’écoute. Son parcours l’a amené à interroger la construction du genre et des masculinités, et iI a depuis à cœur de participer à l’éveil des consciences et à la déconstruction des stéréotypes et dominations en tout genre.
Engagé dans un mouvement chrétien oecuménique, il vit sa foi comme une invitation à la liberté et à l’engagement dans et pour le monde.