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Bonne

Nouv.elle

!

— La parole inclusive du dimanche,
Du premier dimanche de l’Avent au dimanche de Pâques, un.e invité.e nous donne à entendre l’homélie dominicale.

Episode 11

02/02/20 Présentation de Jésus au Temple Marthe Cadart

Et sur Anchor.fm, Spotify ou d’autres plateformes de podcasts.

Textes du jour

Ml 3, 1-4
Psaume 23
He 2, 14-18
Lc 2, 22-40
(Lire les textes sur aelf.org)

Le texte de l’homélie

L’Evangile de ce dimanche nous emmène à la rencontre de deux personnages : Anne et Syméon. Anne passe son temps dans le Temple de Jérusalem, recherchant la proximité avec Dieu. Veuve, alors que la société n’attend plus grand-chose d’elle, c’est aussi une femme d’une grande liberté. On dit d’elle que c’est une femme prophète. Syméon, lui, est habité par un grand désir, voir le “Messie du Seigneur”. Il l’imagine sans doute avec les images de son temps, que nous entendons dans la première lecture et le psaume de ce dimanche : Malachie le décrit comme “un roi de gloire”, “vaillant dans les combats”, “fort”, qui vient “pareil au feu du fondeur” pour ‘’purifier’’. Syméon se demande peut-être avec le prophète “qui pourra soutenir le jour de sa venue, qui pourra rester debout quand il se montrera”. Nous aussi, quand nous pensons à Dieu, nous imaginons peut-être quelqu’un d’un peu terrible, et quand nous pensons à son salut, nous imaginons parfois des choses énormes, qui en imposent. Et comment pourrions-nous imaginer autre chose quand nous regardons, avec nos yeux humains, l’étendue de ce qui est à sauver autour de nous, l’ampleur des enjeux écologiques, sociaux, migratoires… ou même certaines situations familiales, professionnelles ou intérieures qui peuvent nous paraitre insolubles. C’est une conclusion logique, quand nous regardons ces enjeux qui nous dépassent, ces situations qui parfois nous découragent, de nous dire que ce qu’il nous faudrait, c’est quelque chose d’énorme, irrésistible… Qu’est-ce qui fera le poids, sinon ? On ne voit pas bien comment ça pourrait marcher autrement. Et sans doute d’ailleurs que Syméon non plus ne peut pas imaginer qu’un Messie puisse libérer Israël de la domination de l’Empire Romain s’il n’est pas un grand Roi valeureux au combat. Avec Anne, la femme prophète et Syméon, l’homme au grand désir de Dieu, nous sommes dans le Temple de Jérusalem. Un groupe de parents vient, selon le rituel habituel, présenter leurs garçons nouveaux-nés au Seigneur. Dans ce groupe, un petit bébé comme les autres est porté par ses parents. Et il se passe alors quelque chose d’extraordinaire. Syméon, sous l’action de l’Esprit Saint, “reçoit l’enfant Jésus dans ses bras, et rend grâce” en disant qu’il a vu le Salut de Dieu. Anne “survient”, “proclame les louanges de Dieu” et “parle de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem”. Quelle émotion d’entendre Syméon dire de ce bébé qu’il est “la lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à Israël” ! Remarquons qu’il le dit au présent, il ne dit pas que plus tard, cette lumière se révèlera, quand Jésus aura grandi, non, il dit que ce bébé est dès maintenant le salut que Dieu préparait pour son peuple, ce bébé qui ressemble à tous les bébés, qui n’a encore rien réalisé, qui est porté par ses parents, qui ne parle même pas. Quelle foi ! Quel renversement, pour Syméon, de reconnaître le salut de Dieu et la libération de son peuple non pas dans le roi vaillant au combat qu’il imaginait, mais dans ce petit enfant. Quel renversement, pour lui qui craignait de ne pas pouvoir rester debout le jour de la venue du Seigneur, de pouvoir recevoir l’enfant Dieu dans ses bras ! Ce renversement, il est pour nous aussi. Ce renversement, c’est de voir que ce que Dieu introduit dans notre vie, dans notre monde, ce n’est pas du grand, mais c’est du nouveau. Dieu introduit du radicalement nouveau, qu’on n’aurait pas pu inventer ou créer nous-mêmes, qu’on n’aurait même pas cru possible, qui change tout, rien ne sera plus pareil après. Cette nouveauté, Syméon la ressent dans son corps, lui qui prend l’enfant dans ses bras, lui qui dit “Mes yeux ont vu ». Cette nouveauté se manifeste dans la joie qui le fait chanter avec Anne, une joie débordante, une joie qu’ils communiquent autour d’eux. Elle ne fait pas l’impasse sur les difficultés à venir, le combat à mener pour que cette nouveauté fasse tout son chemin. Syméon dit que l’enfant « sera un signe de contradiction et que l’âme [de Marie] sera transpercée par un glaive. » Mais dès à présent, Syméon dit aussi que sa vie est accomplie, que voir ce bébé lui suffit : “Maintenant, ô Maître Souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole…” Et nous ? A nous aussi, comme à Syméon, Dieu dit : “vous ne verrez pas la mort avant d’avoir vu mon Salut”. Dieu s’engage. Si nous croyons que Dieu est à l’œuvre dans notre monde, qu’il travaille aujourd’hui avec nous à notre salut, alors nous pouvons tous reconnaitre des signes qui manifestent son salut, concrètement, tous les jours, autour et avec chacun d’entre nous. Ce sont des choses pas forcément grandes ou éclatantes, mais nouvelles, que nous n’aurions pas cru possibles et qui changent tout pour nous, qui nous remplissent de joie, qui peuvent aussi nous conduire à faire la vérité sur une situation, à prendre parti. Ce sont des conversions intérieures dont les effets extérieurs nous dépassent. Nous avons tous des exemples. Pour ma part, je peux penser à une parole que j’ai reçue dans la prière et qui constitue un nouveau départ pour moi, à un centre social où j’ai vu des personnes anciennement à la rue vivre en communauté avec des bénévoles, à une réunion au travail où une collègue s’est élevée contre une communication mensongère. Ça peut paraître petit, ça peut même paraître bizarre, parfois, mais ça a des effets d’entraînement immenses. Et ce qu’Anne et Syméon me disent, ce qu’ils nous disent, c’est de chanter notre joie car ce que nous voyons là, c’est le Salut de Dieu qui se manifeste. Ce qu’ils nous disent, c’est que ce Salut nous engage avec simplicité, comme Syméon qui reçoit avec tendresse l’enfant dans ses bras. Ce qu’ils nous disent, c’est de croire que, dès aujourd’hui, c’est un Salut qui nous suffit, que Dieu s’engage avec nous et que c’est tout le salut du monde qui déjà est en marche.

Marthe Cadart

Dans son travail et dans ses engagements, Marthe s’intéresse à ce qui met en mouvement les personnes, au terrain commun qu’ils construisent pour agir ensemble. Catholique, elle s’émerveille des dynamiques de création, toujours neuves, toujours singulières, que l’Esprit suscite chez les femmes et les hommes qui lui ouvrent leur oreille et leur coeur.